Collectif d’acteurs


Texte et mise en scène
ÉLISE VIGIER

A partir des récits de
MARION JOFFLE

Avec
ÉLISE VIGIER
LÉNA BOKOBZA-BRUNET

Création sonore
ÉTIENNE BONHOMME

Assistant.e à la mise en scène
FLAVIEN BEAUDRON

Travail sur le mouvement
SÉBASTIEN DAVIS-VANGELDER

Lumières
BRUNO MARSOL

Costumes
LAURE MAHÉO

Régie son et lumière
BAPTISTE GALAIS

Production
Les Lucioles – Rennes

Coproduction
et accueil en résidence
La Comédie de Caen
CDN de Normandie
Théâtre Ouvert
Paris

Nageuse de l’extrême

PORTRAIT D’UNE JEUNE FEMME GIVRÉE

L’idée de ce projet est de mettre en avant le combat de deux femmes qui ont en commun l’expérience du corps fragilisé, diminué, transformé et « augmenté » par l’endurance extrême.
D‘un côté, Marion Joffle, une jeune sportive, nageuse en eau glacée. Cette discipline, encore méconnue en France, se pratique principalement dans des eaux en dessous de 5 degrés. Sport dangereux, il plonge le corps dans un environnement agressif et hostile.
De l’autre, une femme plus âgée, qui affronte également les eaux, dans une traversée de la manche. Mais d’où leur vient cette passion pour l’extrême ?

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NOTE D’INTENTION
ÉLISE VIGIER

L’écriture du spectacle s’articulera autour de trois axes :
- L’Interview/dialogue entre une jeune nageuse et une personne, plus âgée, qui la questionne sur sa vie et ses exploits de l’extrême
- Le récit d’une femme qui, après avoir vaincu la maladie, traverse la Manche à la nage.
- L’écriture sonore illustrant la mer, les paysages et les mouvements du corps dans l’eau.

Je voudrais écrire un texte qui raconte une traversée. La traversée de la Manche.
Une femme se déshabille, rentre dans l’eau froide, glacée, et elle nage.
On éprouve chaque détail de son aventure : les mouvements du corps, les sensations, les découvertes, les rencontres avec les éléments… description du bateau qui l’accompagne et la ravitaille en boissons chaudes et nourritures sucrées.
Elle nage sans s’arrêter vers l’autre rive. Réussira-t-elle à l’atteindre ? Qui a-t-il de l’autre côté ? Qu’est-ce qui se passe dans son corps, dans sa tête pendant l’effort ? Le sel attaque la peau, les muscles, le visage. Les piqures des méduses renforcent la douleur, la fatigue, l’épuisement. Elle ne sent plus les extrémités de ses membres… Où partent ses pensées alors qu’elle nage ?

Cette traversée concrète de la manche croise une autre traversée, celle de la maladie. La rencontre avec le crabe, celui qui mange les entrailles, la perte et le remplacement de certaines parties de son corps... Cette autre traversée arrive en pensée par bribes, pas forcement de façon claire, mais surgit de temps en temps.
Le récit décrit un point de vue subjectif pourtant exprimé à la troisième personne. Une réalité fictive inscrite dans le temps d’une traversée à la nage. Etre dans le concret de cette action : nager. Etre dans les paradoxes et la drôlerie, dans les contradictions.

Sur scène, cette fiction croise une autre réalité : l’interview d’une jeune femme, nageuse en eau glacée, surnommée le « Pingouin souriant ». Les deux histoires se mélangent, se confondent et racontent les apnées, les incertitudes, le comique des situations, le frottement avec l’absurde…

Je suis sortie il y a peu d’une « récidive » (mot terrible ! le même utilisé pour les prisonniers que pour les malades) d’un cancer du sein. J’ai alors pensé à l’histoire d’une femme qui réalise un exploit comme une traversée de la manche.
J’ai envie de parler de manière fictionnelle de cette traversée, et de ce que la maladie modifie dans le rapport à son propre corps que l’on considère soudain comme étrange, étranger, ce corps qui devient une étrangeté, le rapport à la douleur, à la force mentale. Le rapport à la beauté, à l’effort, à la matière terrestre : tout est imperceptiblement modifié. Le lien à la vie change.

J’ai alors rencontré Marion Joffle : elle a 24 ans, elle est nageuse de l’extrême et coïncidence de la vie, elle nage suite à un cancer qu’elle a eu enfant. Elle traverse la Manche en 2021.
De cette rencontre et heureux hasard est né l’envie de travailler ensemble.

Après plusieurs rendez-vous, interviews, enregistrements, je vais retranscrire ce qui constituera une matière pour le texte et le portrait croisé de ces deux femmes séparées par une génération.

Complètement givrée, comme elle se définie, Marion est d’une grande timidité et délicatesse, elle fait des choses folles comme se baigner dans l’Arctique ou traverser la Manche.

Nous commencerons les échanges en mai 23. Marion racontera les sensations, les paysages de ses voyages, les rencontres… le portrait du pingouin souriant se dessinera.

Le corps qui continue à nager alors qu’elle n’est plus là, que son esprit s’est échappé, évaporé par l’effet de l’hypothermie… et pourtant elle nage encore. Son regard qui se pose émerveillé sur ces décors où tout est blanc. Elle nous parlera de ses séances d’entrainement dans des bacs, remplis de glaçons, cachés dans des entrepôts de chambre froide. Habituer et entrainer son corps au grand froid et ce sourire qui nous regarde.
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Le combat contre la maladie m’a forgée. Ça m’a donné envie d’aventures
Marion Joffle

Aujourd’hui en me baignant j’ai cru sentir d’anciennes forces, comme si elles n’avaient pas été affectées par une longue pause.
Comme sont éloignés de moi par exemple les muscles de mes bras

Journal Kafka - (8.III. 1912)

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CRÉATION 24/25


 
@ Théâtre des Lucioles 2024